L’utilisation de Twitter par les partis politiques, l’effet des votations populaires.

L’impact que les réseaux sociaux peuvent avoir sur la politique est devenu un champ de recherche difficile à ignorer. Les réseaux sociaux donnent l’opportunité aux acteurs politiques de jouir d’une communication peu coûteuse, qui peut potentiellement avoir une large portée.  En Suisse, il est notamment intéressant d’observer dans quelle mesure les partis politiques utilisent Twitter pour traiter des votations populaires. En d’autres termes, comment les votations populaires influencent le comportement des partis politiques sur Twitter ?

Pour tenter de répondre à cette interrogation, j’ai récolté tous les tweets du PS, du PLR, du PDC, de l’UDC et des Verts entre le 12 juillet 2016 et le 19 octobre 2018[1]. Au total, cela représente un corpus de 11’011 tweets. Le graphique ci-dessous montre la distribution journalière des tweets selon les partis.

Le graphique présenté donne déjà certaines indications sur l’utilisation de Twitter par les partis politiques. Premièrement, il s’avère que l’UDC est bien moins présent sur Twitter que les autres partis. En effet, dans la période comprise, alors que le PDC envoie en moyenne 3.86 tweets par jour, les verts sont à 3.53, le PLR envoie 3.04, le PS 2.85 et l’UDC n’envoie en moyenne que 0.85 tweets par jour. De plus, on voit aussi une large variance dans le nombre de tweets journaliers au sein d’un parti politique.

Cette variance peut s’expliquer par plusieurs facteurs. Un des éléments à considérer est le contexte politique. En effet, si un événement politique quelconque s’est produit (par exemple, une annonce du Conseil fédéral) ou va se produire (par exemple une élection), il est envisageable que les partis politiques adaptent leur comportement sur les réseaux sociaux en conséquence.  En considérant cela, il est intéressant de voir si les votations populaires affectent les tweets journaliers des partis politiques. Pour ce faire, j’ai pris en compte le nombre de tweets journaliers par les partis politiques dans les 60 jours précédant les votations populaires, et ce, pour 9 dates de votations. Puis j’ai calculé la moyenne journalière du nombre de tweets sur une base hebdomadaire. Le graphique ci-dessous présente l’effet de l’approche des votations populaire sur les tweets des partis politiques[2].

Le graphique montre que plus la date des votations approche, plus les partis utilisent Twitter. Cet effet n’est pas aussi marqué pour tous les partis. En effet, pour le PS et les Verts l’effet est plus prononcé. Pour le PDC et le PLR on observe des variations au fur et à mesure de la campagne, alors qu’il est difficile d’identifier un effet clair dans le comportement de l’UDC. Ce résultat a certaines implications pratiques pour l’étude du comportement des partis politiques pendant les campagnes de démocratie directe. En effet, lors des campagnes en démocratie directe, il est souvent difficile de séparer les communications des comités de campagnes de celles des partis politiques. Il est donc difficile d’étudier en détail le comportement des partis politiques dans ce contexte. Avec les réseaux sociaux, il devient possible d’identifier les acteurs qui sont à la source d’une communication. L’étude des partis politiques sur les réseaux sociaux ouvre donc la possibilité d’étudier plus en détails la manière dont les partis agissent pendant les campagnes de démocratie directe. Cependant, les résultats indiquent aussi qu’une analyse du contenu des tweets est probablement nécessaire pour évaluer la campagnes Twitter des partis politiques sur les objets de démocratie directe.

[1] Pour le PLR, le PS, l’UDC ainsi que les Verts, les données sont issues de deux comptes (un compte en allemand et un compte en français). Le PDC quant à lui n’a qu’un compte principal dans lequel les publications sont faites en français et en allemand. Le nombre de tweets comprend également les retweets.

[2] La moyenne journalière du nombre de tweets hebdomadaire représente la moyenne de tweets journaliers que chaque parti a effectué dans la semaine avec le jour concerné au centre. Cette méthode est connue sous le nom de « moving average » (moyenne mobile). Les lignes bleues représentent le résultat d’une régression locale entre cette moyenne et les nombre de jours jusqu’aux prochaines votations populaires pour chacun des partis politiques.